Togo : pourquoi les assises nationales du football sont désormais inévitables?

La démission de Paulo Duarte de son poste de sélectionneur des Éperviers du Togo marque un nouveau tournant dans l’histoire du football togolais. Le sentiment d’impuissance dans la recherche des solutions aux problèmes de l’équipe nationale a obligé le technicien portugais a jeté l’éponge. Un fait tout sauf anodin et qui doit amener à une profonde réflexion à travers les assises nationales du football avant ou après l’arrivée du futur sélectionneur.

L’effet escompté de la participation des Éperviers du Togo à la Coupe du monde 2006 ne s’est jamais fait ressentir sur le football togolais qui est en décadence depuis 18 ans à part un éclat sous Didier Six qui a été sélectionneur du Togo de 2011 à 2013 et qui a emmené les Éperviers jusqu’aux quarts de finale de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2013 en Afrique du Sud (défaite 0-1 contre le Burkina Faso). Et les raisons de cette dégringolade sont multiples.

Les anciens joueurs délaissés

Dans la gestion du football national après le Mondial 2006, très peu de joueurs qui étaient artisans de cette épopée glorieuse y ont été associés. À part Jean-Paul Abalo Dosseh qui a été sélectionneur adjoint sous Claude Le Roy et sélectionneur national local, Serge Akakpo nommé Manager Général dans le staff de Paulo Duarte avec Kader Coubadja comme sélectionneur adjoint n°2, tous les autres joueurs ont été délaissés. Ouest Foot Afrique ne demande pas qu’ils soient tous dans le staff des Éperviers, mais ces héros de la nation ne doivent pas être oubliés comme ils le sont aujourd’hui après la décoration faite par le Chef de l’État Faure Gnassingbé à l’époque. Le cas Nibombé Waké, livré à lui-même est un exemple.

Une situation qui a créé de la frustration chez certains à l’image de l’ancien capitaine des Éperviers Sheyi Emmanuel Adebayor qui multiplient les directs sur Tiktok en révélant même des secrets les plus camouflés de la sélection. Des histoires jamais racontées qui se dévoilent au grand public et cassent le mythe autour de l’équipe nationale qui est une entité sacrée. Si on est libre d’être d’accord ou pas avec le conteur, c’est un fait qui relance la problématique de la place accordée aux légendes dans notre football. Et pour que les anciennes gloires digèrent leur frustration, une assise s’impose pour que toutes les parties ouvrent leur cœur, soient écoutées afin que la réconciliation soit sincère et totale avant d’envisager la communion sacrée autour du football en général et de l’équipe nationale en particulier.

Le cas de certains sélectionneurs

Le Togo a connu onze (11) sélectionneurs depuis la Coupe du Monde 2006 à ce jour. Parmi eux, certains bâtisseurs et bosseurs n’ont jamais été valorisé à leur hauteur. On pense tout de suite au belge Jean Thissen, arrivé en mars 2009 qui a redonné de l’allan aux Éperviers et fait monter l’espoir d’une potentielle qualification consécutive à la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud. Mais ce dernier va quitter le Togo au bout de six mois sur fond de litige avec la Fédération. Il sera limogé par celle-ci et l’affaire sera même portée devant les plus grands tribunaux et notamment le TAS (Tribunal Arbitral du Sport) qui va lui donner raison et condamné la FTF à lui verser 265 millions de Francs CFA pour « licenciement abusif » et dommages causés.

Pour le remplacer, le Togo a fait appel à Hubert Velud qui a accepté le challenge dans ce contexte particulier. Le Belge va réussir à qualifier les Éperviers pour la CAN 2010 en Angola. Malheureusement , le Togo ne disputera pas la compétition, victime de la fusillade mortelle de Cabinda dans laquelle le sélectionneur va finir avec un bras cassé. Conséquence, il a démissionné de son poste après le retour au pays et est rentré chez lui sans le moindre suivi médical.

Didier Six est l’autre nom sinon le nom qui a marqué l’histoire du football togolais de son empreinte après la Coupe du monde 2006. Arrivé en 2011 pour succéder à Thierry Froger, le technicien français a réussi ce que personne d’autre n’a jamais réalisé avant ou après lui : amener le Togo jusqu’en quart de finale de la CAN. Une performance historique avant l’élimination de Kossi Agassa, Emmanuel Adebayor, Serge Akakpo, Floyd Ayité et compagnie contre le Burkina Faso. Mais comme ses prédécesseurs, lui aussi partira dans la plus grande discrétion et même sur fond de discorde avec la Fédération alors dirigée par Gabriel Ameyi à qui il a rendu sa démission après une défaite (0-2) à Tripoli contre la Libye en éliminatoires du Mondial Brésil 2014 pour une histoire de primes non payés aux joueurs selon Jeune Afrique.

À ces trois noms on peut ajouter le dernier à quitter son poste Paulo Duarte qui a fait un travail foncier même s’il a raté la CAN 2023. Les quatre entraîneurs susmentionnés ont quelque chose en commun : ils n’ont jamais eu la reconnaissance de leur travail dans le football togolais et sont partis frustrés et le cœur meurtri. Ce qui reste un grand défaut dans le milieu du football togolais. Stephen Keshi peut également être inclu dans cette liste même si son deuxième passage (2006-2008) après le Mondial 2006 a été moins réussi que le précédent (2004-2006) et la qualification historique pour la Coupe du monde en Allemagne. Un match a été organisé en son honneur le 21 juin 2016 après sa disparition mais il faudra renouer contact avec les anciens membres de son staff et de l’entourage des Éperviers à l’époque qui sont toujours vivants pour faire des offices à qui de droit afin de demander sa bénédiction.

Les faits supra naturels

On a beau défendu l’hypothèse selon laquelle le football se joue à onze contre onze sur un terrain et que la meilleure équipe l’emporte à la fin, mais le Togo n’a pas tout fait dans l’ordre normal des choses depuis la Coupe du monde 2006 et a été frappé par des malheurs depuis 18 ans.

Seulement un an après cette participation au Mondial, le crash de Lungi a endeuillé les Togolais faisant 13 morts dont Richard Attipoé, ministre des sports d’alors, le 3 juin 2007. Si depuis, des messes de commémoration et moments de recueillements sont observés dans les lieux de cultes et auprès des familles des victimes, cela n’a pas empêché le sort de frapper à nouveau le Togo le 8 janvier 2010 avec l’attentat de Cabinda un peu moins de trois ans après. Ce mitraillage de bus a coûté la vie à Stanislas Ocloo (Chargé de communication et Abalo Amelete, entraîneur adjoint). S’il est resté en vie, Kodjovi Obilalé verra sa prometteuse carrière s’arrêter là. Devenu paralysé depuis ce jour, il portera les stigmates de cet attentat pour toujours.

Ces hommes là méritent largement mieux que les hommages qui leur ont été rendus. Ceux qui étaient proches de la sélection à l’époque et qui réclament des primes non payés doivent être également pris au sérieux pour que les vérités soient dites afin que le pardon soit total. Ainsi, on pourra demander des comptes à ceux qui ont effectué en 2022 des rituels d’inhumation pour les âmes des 13 disparus du crash de Lungi et ont promis une fin des misères du football togolais. Le tout non pas dans une dynamique de chasse aux sorcières mais dans un esprit de recherche de cohésion autour du football togolais et de solutions pour redonner à l’équipe nationale son lustre d’antan.

Lorsque tout ce qui a été mentionné ci-haut sera pris en compte, une bonne ambiance permettra de définir une vraie politique de développement du football à travers la construction d’infrastructures modernes pour qu’un grand nombre de jeunes ait accès à la pratique du football sur des installations modernes avec des formateurs agréés.

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